REGARD SUR LA CLASSIC WEEK

« Dans la Classic Week, la confrontation et le voisinage entre les époques et les arts gardent l’œil en alerte, créent la curiosité tout en ayant quelque chose de très reposant. Les deux meubles de la vente ayant appartenu à Marie-Antoinette sont, eux, de véritables chefs-d’œuvre. Par son décor le fauteuil est proprement extravagant. Pour la scénographie, j’ai eu grand plaisir à pouvoir bousculer l’agencement de la maison pour offrir à ces objets royaux la respiration qu’ils méritent. Il serait intéressant de pousser l’art du mélange encore plus loin. Il n’y a pas de rupture mais une continuité entre le dessin du XVIIIe siècle et le design d’aujourd’hui. L’époque importe peu, la qualité de la ligne prime sur tout. Christie’s, plus qu’une maison de vente, est un baromètre du goût. »

Patrick Hourcade, Artiste, scénographe de l’exposition le XVIIIe siècle aux sources du design, Château de Versailles

LES ARTS CLASSIQUES ET MARIE-ANTOINETTE EN UN FAUTEUIL

Œuvre du plus génial des créateurs de sièges Louis XVI, Georges Jacob, un fauteuil royal à l’étrusque alliant originalité du décor sculpté et pureté de la ligne a été adjugé 906 000 € soit neuf fois son estimation prévente. Il illustre le rayonnement artistique de son illustre commanditaire, la reine Marie-Antoinette qui ne cesse de susciter les passions. Il témoigne ainsi de l’intérêt renouvelé des collectionneurs pour les incessantes et très exigeantes recherches esthétiques du XVIIIe siècle. Le siège d’époque classique, domaine d’excellence d’un design qui ne dit pas encore son nom, obtient de très beaux résultats. Parmi les quelques dizaines de lots proposés durant la Classic Week on remarquera un fauteuil d'apparat estampillé Jean Avisse, triplant son estimation, ou encore une chaise à châssis, estampillée Pierre Falconet et livré pour le Duc de Penthièvre qui la multiplie par sept. Adjugée 2,5 M€, La nymphe Ersilie effrayée par un satyre masqué, offre à ce chef-d’œuvre d’Eduard Müller une formidable envolée et un record pour l’artiste. Ce résultat pour une sculpture à l’incontestable virtuosité, parfait exemple de l’esprit antiquisant gréco-romain de son époque, témoigne de l’intérêt croissant du marché pour la sculpture néo-classique du XIXe siècle dès lors qu’elle est de très grande qualité. Le Teylers Museum de Haarlem au Pays Bas et la National Gallery of Victoria à Melbourne en Australie figurent ainsi parmi les quatre musées qui se sont portés acquéreurs de lots proposés, confirmant la qualité muséale de nombre d’entre elles.

• Les 4 ventes totalisent : 16 179 456 €

• 551 lots vendus en 4 ventes dont

• 54% au-dessus de leur estimation haute

• 22 lots franchissent le seuil de 100 000 €

• 2 records du monde

• 4 acquisitions par des musées

Alexandre Mordret-Isambert Spécialiste Sculpture chez Christie’s : « Cette vente confirme le net regain d’intérêt que nous observons ces derniers mois pour les œuvres classiques. Nous l’avions déjà constaté à l’occasion des ventes des collections Getty et Givenchy. C’est particulièrement frappant pour la Sculpture, notamment pour les œuvres néo-classiques spectaculaires. »

PENSEE CLASSIQUE ET ESPRIT DE SCIENCES

Trésor de bibliophilie autant que témoignage précieux de l’intérêt pour la chose mathématique de Colbert, fondateur de l’Académie Royale des sciences, un extraordinaire exemplaire des Lettres de A. Dettonville, composé par son bibliothécaire personnel, et relié à ses armes, a été adjugé pour 378 000 €. Le département des livres a ainsi inauguré la Classic Week par une vente où s’est manifesté avec force l’appétit des bibliophiles pour les exemplaires de qualité, les éditions rares et les provenances de prestige. Ce résultat obtenu par un ouvrage publié sous pseudonyme par Blaise Pascal, à la suite d’un défi mathématique qu’il avait lancé à toute l’Europe témoigne de l’intérêt du marché pour les documents et le patrimoine scientifiques. Lors de l’édition 2021, un important microscope du XVIIIè siècle, témoignage des aspirations et des inclinations d’une société pour l’exigence scientifique la plus haute, avait franchi la barre du million d’euros, faisant plus que tripler son estimation comme l’ouvrage proposé cette année. 

« Le XVIIIe siècle français, fait d’exubérance, de jeunesse, de mesure et d’harmonie, représente la vie telle qu’elle mérite d’être vécue »

Karl Lagerfeld, Karl de Marie Ottavi aux Editions Robert Laffont 2021

CHANEL, LAGERFELD ET LESAGE AU SOMMET

Adjugé 277 200 € à la National Gallery of Victoria à Melbourne en Australie, un rarissime manteau du soir de la collection Automne - Hiver 1996 réalise un nouveau record du monde pour la Maison Chanel et signe un vibrant hommage au génie de Karl Lagerfeld. Amoureux de Versailles et du XVIIIe siècle à l’érudition légendaire, il offre ainsi presque sans surprise et en toute légitimité l’un de ses temps forts à la Classic Week parisienne. Ce résultat s’inscrit aussi dans une dynamique de reconnaissance de l’œuvre du couturier par le marché (après la vente, en décembre dernier chez Christie’s, de plusieurs dessins qui ont pulvérisé leurs estimations) et précède la grande rétrospective qui lui sera consacrée au MET en 2023. Il permet aussi à Christie’s de signer une nouvelle page de l’histoire qui lie la maison à la mode. Celle-ci s’écrit exclusivement au fil de collections emblématiques (Elisabeth Taylor en 2011, Catherine Deneuve en 2019, et une très belle collection à venir dès janvier 2023), et de pièces remarquables. Une appellation amplement méritée par ce manteau de la série Coromandel, chef-d’œuvre de broderie de la Maison Lesage, fidèle compagne des plus grands créateurs de la Haute Couture.

Hubert Barrère, Directeur artistique Maison Lesage : « Il est très émouvant de voir cette pièce unique, fruit d’une collaboration privilégiée et historique entre les maisons Lesage et Chanel, susciter un tel engouement. Voir cette pièce, symbole du savoir-faire et de l’excellence de la Maison Lesage, entrer dans les collections d’un grand musée international, me touche au plus haut point. L’histoire est vraiment belle. »

OBJETS DE FASCINATION

Les images fortes et caractéristiques d’une époque et de son esthétique sont aussi très prisées du marché, à l’image de ce Salvator Mundi peint d’après Léonard de Vinci, plus d’un siècle après la célèbre œuvre du grand maître de la Renaissance. Adjugée 1 062 000 € cette copie tardive s’inscrit dans la droite ligne des répliques de Mona Lisa qui ont réalisé des résultats très importants dans différentes ventes aux enchères ces dernières années. Les œuvres de Léonard de Vinci fascinent tant, qu’il existe un marché de plus en plus important pour des images réalisées, même tardivement, d’après ses œuvres. Un phénomène qui tend à s’amplifier.